Introduction
La chaîne de valeur épargne des unités de compte (UC) se caractérise aujourd’hui par une forte intermédiation liée à la multiplicité des opérations et l’intervention de très nombreux acteurs : société de gestion, émetteur, dépositaire, assureur, distributeur et client final. Ces acteurs occupent des fonctions distinctes et agissent pour certains d’entre eux essentiellement en qualité d’intermédiaires au cours du processus.
Le développement de nouvelles technologies rend aujourd’hui possible une accélération de la désintermédiation de cette chaîne de valeur.
Ce mouvement a déjà commencé très en amont de la chaîne, au niveau des échanges entre distributeur et assureur, avec la digitalisation du parcours client qui permet de proposer une expérience client augmentée et personnalisée. Un argument commercial important, a fortiori dans le contexte de pandémie actuel favorable aux interactions en ligne.
Les entreprises de technologie financière, ou Fintechs, et des conseillers en gestion de patrimoine via des plateformes, se sont positionnés sur ce segment. Ils proposent des solutions de selfcare, au travers d’applications telles que les robo-advisors, faisant appel à l’intelligence artificielle (IA).
Ces robots, en B2C (Business to Consumer), jouent le rôle de conseillers pour les clients particuliers qui ne souhaitent ou ne peuvent pas se déplacer en agence, ou qui préfèrent avoir un conseil personnalisé et à distance. Mais ils peuvent aussi, en B2B2C (Business to Business to Consumer), aider les professionnels dans la prise de décisions. Ils permettent, en outre, de recueillir des informations client et de les faire remonter de manière automatisée aux distributeurs et aux assureurs via des API (Application Programming Interface).
À ce premier mouvement, vient s’ajouter une deuxième vague de désintermédiation liée à l’essor de la blockchain et des smart contracts. Ces technologies permettent de poursuivre la désintermédiation déjà engagée sur le segment de la distribution mais aussi d’opérer une désintermédiation des relations entre assureurs et sociétés de gestion, aujourd’hui gérées par les dépositaires.
Ce potentiel est déjà perçu par de nombreux acteurs opérationnels sur la chaîne de valeur épargne. Un sondage que nous avons mené auprès d’un panel de 23 acteurs de la banque et de l’assurance intervenant sur l’ensemble de la chaîne de valeur (back, middle et front office), montre que la majorité d’entre eux (75%) voient la blockchain comme une opportunité, et que tous soit l’utilisent déjà (38%), soit ont songé à l’utiliser (62%). Ils y voient des possibilités d’automatisation des flux de souscription et des opérations de gestion, ainsi que de mutualisation des processus de KYC (Know Your Customer). De quoi, selon eux, réduire les coûts et les délais de traitement des opérations et accroître la traçabilité des données.
Ces technologies constituent donc une véritable opportunité pour les assureurs de répondre aux exigences des clients en proposant un service personnalisé, tout en réalisant des économies d’échelle, grâce à une réduction des coûts fixes et des délais de traitement des dossiers et des ordres. Elles offrent aussi aux assureurs et aux autres acteurs de la place un fort potentiel de sécurisation de leurs données.
Ce sont ainsi des segments entiers et essentiels de la chaîne de valeur UC qui peuvent être transformés par ce mouvement de désintermédiation. Dès lors, quels sont les facteurs qui incitent les acteurs à s’y engager, et comment cette décentralisation va-t-elle modifier l’ensemble de l’organisation de la chaîne de valeur UC ?
Nous analyserons les évolutions des relations entre les différents acteurs en vue de distinguer les réorganisations possibles et les impacts opérationnels sur le parcours client (partie 1) puis sur les fonctions de Back et Middle Office (partie 2). Nous pourrons ainsi identifier quels acteurs pourront bénéficier de ces changements et à quelles conditions (partie 3).
Sommaire
Introduction
PARTIE 1 – PARCOURS CLIENT : QUELLE RÉORGANISATION DES RÔLES ?
- Moins d’intermédiaires, au profit du client
- L’épargne en unités de compte : une activité complexe
- La Blockchain au service de la désintermédiation
- Une transition complexe pour les assureurs
PARTIE 2 – BACK ET MIDDLE OFFICES : LES IMPACTS OPÉRATIONNELS DE LA DÉSINTERMÉDIATION
- D’un modèle centralisé à un modèle décentralisé
- Pourquoi une chaîne d’acteurs plus courte est-elle envisageable?
- La croissance des encours UC fragilise l’équilibre actuel
PARTIE 3 – ENTRE AUBAINE ET DANGER, VERS UNE NOUVELLE CARTOGRAPHIE DES ACTEURS DE L’ÉPARGNE
- Quels acteurs peuvent tirer parti d’une chaîne de valeur épargne réorganisée ? et comment ?
- Quelles stratégies pour les acteurs menacés par la désintermédiation ?
- Quels sont les freins à cette désintermédiation ?
Conclusion
Annexes
- Devoir précontractuel
- Le devoir de conseil
- Le RGPD et la blockchain