Les nouvelles obligations en termes de reporting constituent un premier indice tangible des mutations à l’œuvre. En effet, le régulateur français (ACPR) et la Banque Centrale européenne (BCE) marquent leur volonté d’aller plus loin dans le contrôle du secteur de l’assurance à travers deux nouveaux types d’états : les Etats Nationaux Spécifiques (« états réglementaires revisités ») et les états BCE.

Pour la BCE, il s’agit, via l’enrichissement de deux états « S2 » existants et la création de trois nouveaux états dédiés, de tirer parti de la vision Solvabilité 2 Solo (la vision « Conso » n’est pas concernée) à des fins de statistiques. Les nouveaux états ou les états enrichis ne comportent ainsi pas de nouveaux contrôles pour le moment (des contrôles de cohérence basiques sont cependant prévus). Après les premières remontées d’informations, il ne faut toutefois pas exclure la mise en place de contrôles contraignants supplémentaires. A titre d’exemple, une colonne ajoutée au Bilan S2 permet de mettre en lumière les ajustements survenus depuis le reporting précédent et liés à des erreurs de classification des actifs financiers (erreur de code CIC) ou des engagements techniques (erreur de Line of Business et / ou impact sur les engagements techniques des erreurs de classifications d’actifs).

Degré accru de complexité des états

Le but poursuivi par le législateur français est plus directement contraignant. L’ACPR dispose en effet d’un puissant levier : celui des comptes sociaux, avec la refonte de Solvabilité 1 par le biais des ENS.

L’objectif est de palier les « angles morts » de Solvabilité 2 et de couvrir des spécificités nationales réglementaires ou de marché. Ces nouveaux ENS représentent un défi pour les assureurs français.

D’une part, en raison d’un délai très court de mise en œuvre, puisque le nouveau jeu de 27 états sera exigible dès avril 2017. D’autre part, en raison d’un degré de complexité accru des états. Désormais, des points de contrôle devront être validés pour permettre la soumission électronique des ENS. Les comptes autorisés à alimenter certaines lignes de reporting ont été définis de façon limitative. Enfin, le niveau de granularité demandé tend à se rapprocher de Solvabilité 2, voire à le surpasser. L’exemple le plus frappant est l’apparition d’états propres à chaque canton réglementaire ainsi qu’au fonds général, dont les totaux additionnés doivent correspondre au total affiché dans les comptes sociaux globaux. Rappelons que la réglementation Solvabilité ne requiert que les cantons les plus importants.

Vers un nouveau durcissement des règles du jeu ?

Un autre indice des évolutions à venir est à trouver dans l’évolution du secteur bancaire. Celui-ci continue de renforcer une législation déjà très contraignante : ainsi, la mise en place prochaine de Bâle 3 ou encore la proposition de repasser toutes les banques en méthode standard (1) témoignent du durcissement des règles du jeu. Or, les tendances à l’œuvre dans le secteur bancaire sont bien souvent un aperçu de ce qui attend le secteur de l’assurance. Solvabilité 2 est ainsi l’adaptation de Bâle 2, avec des objectifs toutefois nettement plus souples. On peut ainsi penser que, comme ce fut le cas pour les banques, les marges de manœuvre des assureurs iront en se réduisant.

En conclusion, avec la refonte des ENS et les ajouts BCE au reporting « S2 », on constate un resserrement du contrôle du législateur sur la gestion comptable et financière du secteur de l’assurance. Un rapprochement est en cours avec les obligations prudentielles du secteur bancaire qui dessinera probablement le futur visage du monde de l’assurance.

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(1) A l’heure actuelle, les banques peuvent opter pour la méthode standard d’évaluation des risques ou pour une méthode interne adaptant leurs exigences en fonds propres au plus près de leur activité.